Films tissus complexes ignifuges

En sécurité incendie, la «réaction au feu» et la «résistance au feu» sont deux choses différentes. Elles sont codifiées au niveau national et européen de manière très réglementée. La réaction au feu est la représentation d’un matériau en tant qu’aliment du feu (combustibilité, inflammabilité), définie par l’Arrêté du 21 novembre 2002. La résistance au feu est le temps durant lequel l’élément de construction joue son rôle de limitation de la propagation.
Pour les établissements recevant du public, il existe une règlementation incendie plus ou moins exigeante selon la fréquentation et le type de public, la surface et l’usage des locaux concernés. Les normes de sécurité contre les risques d’incendie sont règlementées depuis au moins 1976. Elles sont régulièrement révisées et plutôt durcies.

  • Classification au feu

Il existe en France un classement sous norme NF P92-507, composé de 5 catégories qui définissent la réaction au feu des matériaux : ils vont de M0 pour l’ininflammable à M4 pour désigner les matériaux les plus inflammables jusqu’à leur propension à la propagation du feu. Cette classification, qui correspond au temps de résistance d’un matériau à une température donnée, est établie par des laboratoires agréés par le ministère de l’Intérieur, comme le CSTB et le LNE dont les sites délivrent de plus amples informations.
De plus il faut aussi préciser 2 choses : La combustibilité qui est la quantité de chaleur émise par combustion complète du matériau, tandis que l’inflammabilité est la quantité de gaz inflammable émise par le matériau.
Les matériaux sont testés pour leur résistance au feu, puis classés selon 5 catégories de niveau d’inflammabilité :

  1. M0 : incombustible à peu combustible : Acier, béton, pierre, produit céramique, brique, plâtre, ardoise, aluminium…
  2. M1 : Non inflammable : Bois ignifugé, plaques de plâtre cartonnés.
  3. M2 : Difficilement inflammable : Profilés PVC, textiles : laine. Fibres qui cessent de brûler une fois que la source d’inflammation est retirée.
  4. M3 : Moyennement inflammable :  Bois massif non résineux d’au moins 14mm d’épaisseur, panneaux dérivés du bois d’au moins 18mm d’épaisseur.  Textiles : acrylique, nylon, polyester, soie… Ces fibres ont tendance à fondre et à dégoutter en s’éteignant parfois toutes seules lorsque la source d’inflammation est retirée.
  5. M4 : facilement inflammable : Bois massif non résineux d’épaisseur inférieur à 14mm, bois massif résineux et panneaux dérivés du bois, d’épaisseur inférieure à 18m, plastiques, carton. Textiles : coton, acétate, rayonne…Ces fibres s’enflamment facilement et brûlent rapidement en produisant des cendres légères.
  • Classification européenne

Fin 2002 apparait désormais les « euroclasses », classification plus complète qui prend en compte les fumées dégagées ainsi que d’éventuelles gouttelettes projetées. Cette classification n’est valable toutefois que pour les produits de construction avec trois distinguos, les matériaux de sols (indice fl pour « floorings »), les matériaux longilignes (indice « l ») et les autres produits de construction.

Les « euroclasses » tiennent aussi compte de deux autres critères essentiels (après tests en laboratoire) :

• L’opacité des fumées (quantité et vitesse) notée s pour smoke
o s1 : Quantité et vitesse de dégagement faibles
o s2 : Quantité et vitesse de dégagement moyennes
o s3 : Quantité et vitesse de dégagement hautes

• Les gouttelettes et débris enflammés notées d pour droplets
o d0 : aucun débris
o d1 : aucun débris dont la combustion ne dure pas plus de 10 secondes
o d2 : ni d0 ni d1

Compte tenu de ces normes, il est donc important de traiter certains matériaux suivant les utilisations.
L’ignifugation désigne l’action qui consiste en l’ajout d’un apprêt chimique de protection qui transforme une matière inflammable en une matière non-inflammable ou difficilement inflammable. Une substance ignifuge protège donc de la combustion ou de l’échauffement des matériaux qu’elle imprègne ou recouvre. L’ignifugation est une technique qui a pour but au moins de retarder, au mieux de stopper la propagation des flammes. Il s’agit d’un des éléments de la protection passive contre l’incendie.

4-points-à-retenir-du-règlement-10-2011-contact-alimentaireLes traitements d’ignifugation concernant d’une façon générale : les espèces de bois et de ses dérivés, les textiles naturels et certains textiles techniques, l’acier & éléments métalliques et certaines matières plastiques.
La formulation de coating reste la clef de la protection au feu pour protéger les matériaux. Il faut donc trouver la meilleure chimie pour obtenir les meilleures performances au feu.
Il existe sur le marché des films polyester ayant des propriétés « flamme retardant ». C’est une propriété apportée au moment de la fabrication du film pendant l’extrusion. Les additifs ignifuges sont incorporés dans la masse du film. Par conséquent on obtient des films avec une résistance au feu très élevée.
Toutefois, on rencontre plusieurs inconvénients. Ces films sont très épais et le complexage est rendu très difficile. Les forces de collage sont souvent peu élevées compte tenu de la migration de certaines matières en surface qui viendraient modifier les propriétés adhésives de la colle. Les additifs incorporés viennent modifier la tension de surface des films et par conséquent l’étalement de la colle et son adhésion est modifiée. De plus ces films sont très onéreux. Ils peuvent également présenter une certaine opacité (blanc) ce qui n’est pas recherché suivant certaines applications.

 

Afin de pallier aux inconvénients ci-dessus, on cherche à développer des colles ou des vernis susceptibles d’obtenir les mêmes propriétés ; avec des mono films ou bien en association avec plusieurs films. On choisit une résine servant de matrice dans laquelle on va incorporer des charges ignifuges. On s’intéresse donc aux différentes chimies disponibles sur le marché via les fournisseurs. Plusieurs chimies sont disponibles pour conférer des propriétés anti feu. A savoir trois grandes catégories :

  • Chimie des halogènes (chlore, brome, fluor).

Fonctionnalisés avec époxy, alcool, cycle. Ex : paraffine chlorée

  • Chimie des métaux (Sb, Al, Mg, Mo, Zn).

Sous forme d’hydratée ou oxydée. Ex : Hydrate d’aluminium- 2Al(OH)3, de magnésium- Mg(OH)2, de molybdène, de bore ou oxyde d’antimoine (Sb2O3), oxyde de zinc.

  • Chimie des non métaux : (phosphore et azote)

Fonctionnalisés avec époxy, alcool, cycle, polyester insaturé

 

Chaque catégorie a des avantages et des inconvénients. Le premier inconvénient majeur est celui concernant la santé lors de l’utilisation de ces produits. En effet, les ignifuges sont souvent classés dans des catégories CMR (cancérigène, mutagène et reprotoxiques).
Les additifs halogènes ont une mauvaise presse. En effet, les produits de dégradation sont souvent bien plus nocifs que les additifs eux-mêmes. C’est une volonté de ne pas les utiliser. Il présente cependant une très bonne efficacité.
La chimie des métaux est également connue avec le trioxyde d’antimoine. Ces additifs rendent le mélange (colle ou vernis) blanchâtre alors que l’on souhaite garder un aspect incolore.

Par exemple, certains produits ignifuges bromés (PBDE, PBB), substances chimique ajoutées aux plastiques, à de l’équipement électrique et électronique, à des meubles rembourrés, à des textiles non destinés aux vêtements et à des produits en mousse sont interdits en Europe, car difficilement dégradables et soupçonnés d’avoir des effets perturbateurs endocriniens.

Afin de garantir l’absence de certains produits dans les formulations, la directive européenne RoHS (200/ 95/ CE) vise à limiter l’utilisation de six substances dangereuses. RoHS est l’acronyme de Restriction of Hazardous Substances.

Aujourd’hui certaines entreprises de produits électroniques et de meubles utilisent des ignifuges à base de phosphate (TBBPA) dans les pièces en plastiques et fabriquent maintenant des ordinateurs, du matériel HI-FI, des meubles rembourrés, des sous tapis, des matelas qui ne contiennent pas de PBDE.

 

CONCLUSION : La tenue au feu d’un matériau fait l’objet d’une grande variété de normes, selon les conditions opératoires spécifiques. Il est donc important d’appréhender l’ignifugation des matériaux afin de garantir la sécurité des lieux dans lequel se trouve ces derniers.

Bénédicte Larrieu, R&D